Par Antoine Mercier
Master Sciences de la Terre et des Planètes, Environnement – ENS/ LYON 1 et Master GéoNum
Le vendredi 11 mars 2011 à 5 :46 :27 UTC, un séisme de magnitude 9.1 Mww [a] frappe la côte de Honshu, au nord-est du Japon [1] . Il provoquera un tsunami de plus de 40m de haut, et causera la mort et la disparition de plus de 20 000 personnes. L’onde de choc et le tsunami engendreront la catastrophe nucléaire de Fukushima, la plus terrible de l’histoire après Tchernobyl. Ce séisme s’est produit à faible profondeur (25 km) dans la zone de subduction japonaise, où la plaque tectonique pacifique plonge vers l’ouest sous la plaque nord-américaine à une vitesse de environ 83 mm.an-1 [2]. L’onde de choc a été si puissante que les ondes sismiques ont fait plusieurs fois le tour de la Terre, elles ont notamment été captées à plus de 1000km de là, par le réseau sismique américain USarray. Un réseau très dense de capteurs sismiques :
- 400 sismomètres mobiles, déplacés à travers le continent américain, espacés régulièrement d’une distance de environ 70km. Chaque instrument reste en place pendant deux années et est ensuite déplacé plus à l’est.
- 200 sismomètres « flexibles », qui sont déplacés en fonction des zones d’étude : faille spécifique, volcan, etc…
- 100+ sismomètres permanents. Permettant de couvrir en continu l’ensemble du territoire, ils sont espacés d’une distance d’environ 300km.
Source : http://ds.iris.edu/spud/gmv/4841
La carte a été construite par l’IRIS (Incorporated Research Institutions for Seismology), une institution Universitaire dédiée à la collecte et la diffusion de données sismiques. Elle est directement disponible sur la banque de donnée en ligne [3]. Le fond de carte est composé de la carte du découpage administratif des États-Unis, où chaque station sismique est représentée par un cercle blanc. Le passage des ondes sismiques sur les stations provoque le déplacement du capteur qui change alors de couleur : rouge un mouvement vertical vers le haut et bleu un mouvement vertical vers le bas. L’orientation et l’amplitude du mouvement horizontal sont représentées par un trait partant de la station et variant en longueur et en orientation en fonction du déplacement [4].
DISCUSSION ET CONCLUSION
Cette carte est une production visuelle unique, permettant d’observer directement la propagation des ondes sismiques dans le continent. De plus, le code couleur et les figurés utilisés permettent de mettre en évidence les différents trains d’ondes arrivant. En effet, l’épicentre du séisme se situant suffisamment loin des stations sismiques, les différentes ondes sismiques se séparent en fonction de leur vitesse de propagation. Elles sont donc bien distinctes à leur arrivée sur les sismomètres. On peut facilement observer successivement l’arrivée des ondes :
- Les ondes P : pressure waves / primary waves, les ondes de pression. Ce sont des ondes de compression/dilatation (mouvement parallèle au sens de propagation de l’onde). L’épicentre du séisme étant lointain, les ondes arrivent quasiment perpendiculairement à la surface, le mouvement apparent est donc purement vertical (Uniquement des variations de couleurs et non des traits horizontaux).
- Les ondes S : shear waves / secondary waves, les ondes cisaillantes. Elles ont un mouvement perpendiculaire au sens de propagation de l’onde. Engendrant un mouvement quasiment purement horizontal.
- Les ondes de surface R1 et R2 : ondes de Rayleight : ondes de surface résultat des interférences entre les ondes P et S. Elles ont un mouvement circulaire très perturbé car résultant d’interférences.
En tant que géologue intégré dans une promotion de géomaticiens, je tenais à monter un carte intrigante, étonnante et présentant un phénomène peu connu. Cette carte originale réuni ces critères, elle permet de mettre en évidence un phénomène en mouvement, non perceptible et pourtant révélé par l’instrumentation. La mise en lumière d’un phénomène par la visualisation de données : une cartographie dynamique.
Références
[a]Mww : Magnitude de moment sismique utilisée pour les séismes de magnitude supérieure à 5.0, elle est calculée directement à partir des paramètres géométrique de la faille et correspond à l’énergie libérée lors du séisme.
[1] SHAO, G., LI, X., JI, C., & MAEDA, T. (2011). Focal mechanism and slip history of the 2011 M w 9.1 off the Pacific coast of Tohoku Earthquake, constrained with teleseismic body and surface waves. Earth, planets and space, 63(7), 9. doi: https://doi.org/10.5047/eps.2011.06.028
[2] HAYES, G.P., MYERS, E.K., DEWEY, J.W., BRIGGS, R.W., EARLE, P.S., BENZ, H.M., SMOCZYK, G.M., FLAMME, H.E., BARNHART, W.D., GOLD, R.D., AND FURLONG, K.P., (2017), Tectonic summaries of magnitude 7 and greater earthquakes from 2000 to 2015 : U.S. Geological Survey Open-File Report 2016–1192, 148p., https://doi.org/10.3133/ofr20161192
[3] IRIS DMC (2010), Data Services Products : GMV The Ground Motion Visualization, doi :10.17611/DP/4841 http://ds.iris.edu/spud/gmv/4841
[4] IRIS education. (2018). Tutorial Data Visualizations. https://www.iris.edu/hq/programs/epo/visualizations/tutorial
Modérateurs : Kévin Lornage