Organisation spatiale du réseau routier urbain

Par Benoît Blanc

Geoff Boeing présente une infographie de l’organisation spatiale du réseau routier urbain dans 100 villes à travers le monde (figure1) . Les différents paramètres pris en compte dans cette étude sont l’orientation des rues, la connectivité entre elles, la granularité et l’entropie * (qui caractérise le degré de désordre d’un réseau).

Figure 1 : Orientations des réseaux routiers urbains classés selon un indice d’ordre spatial (https://geoffboeing.com)

Pour représenter chaque ville par un histogramme polaire, l’auteur a utilisé les données d’OpenStreetMap avec OSMnx, une bibliothèque Python qu’il a lui-même développée, qui permet d’extraire le réseau routier d’une ville pour ensuite le modéliser, le visualiser et analyser sa complexité. La direction des barres de l’histogramme représente l’orientation des rues, alors que la longueur montre le nombre relatif de rues avec cette orientation. Ainsi, on peut classer les villes selon leur réseau routier urbain, de la plus ordonnée (Chicago) à la plus désordonnée (Charlotte).

Figure 2 : Exemples des réseaux routiers de Manhattan et Boston (https://geoffboeing.com)

On voit avec les exemples de Manhattan et Boston (figure2), que l’organisation du réseau routier est facilement visible, avec une structure ordonnée selon deux axes pour Manhattan (axe Nord-Est – Sud-Ouest et axe Nord-Ouest – Sud-Est) alors que l’organisation de Boston montre une distribution du réseau plus diffuse. On remarque malgré tout quelques quartiers qui sont organisés selon deux axes mais l’ensemble des quartiers réunis forme un désordre puisque les orientations des rues de chaque quartier diffèrent entre elles. Cela résulte donc en un histogramme plus éclaté dans ce dernier cas.

Grâce à cette étude, l’auteur a développé un indicateur de classement d’orientation qui permet de quantifier la façon dont le réseau routier d’une ville suit une logique géométrique selon une grille. On peut ainsi mesurer l’étendue du quadrillage et le graduer. On constate alors que les villes du continent Nord-Américain ont un indicateur moyen environ 13 fois supérieur que les villes européennes, qui présentent des réseaux routiers plus tortueux avec moins de carrefours à 4 branches, représentatifs d’une organisation en damier.

Pour aller plus loin, Geoff Boeing a classifié les villes en clusters pour les explorer selon leurs similarités ou différences. On peut retrouver la méthodologie de classification utilisée dans sa publication.

Figure 3 : Classification hiérarchique des villes selon leur réseau urbain réparties dans 8 clusters (https://geoffboeing.com)

Beaucoup de villes Nord-Américaines se concentrent dans trois clusters (rouge, orange et bleu), qui représentent les villes respectant un réseau routier similaire à un plan hippodamien, en majorité avec une orientation Nord-Sud – Est-Ouest. Ces trois clusters sont d’ailleurs presque exclusivement composés de villes américaines et canadiennes. La ville de Charlotte se place dans un cluster où se retrouvent des villes en partie bâties lors de l’ère communiste du 20ème siècle (Moscou, Varsovie, Kiev, Pyongyang, …). Les villes chinoises de Pékin et Shanghai sont dans un cluster à part, leur réseau étant différent de toutes les autres villes étudiées. Le cluster gris foncé représente les villes avec les réseaux les plus sinueux (Sarajevo, Caracas et Hong Kong). Aussi, on retrouve les villes d’Europe classées dans 3 clusters (vert, violet et gris clair) qui présentent des villes avec une forte entropie et une orientation des rues désordonnée.

Pour conclure, cette visualisation montre rapidement l’organisation en damier pour les réseaux routiers des villes Nord-Américaines. Les autres régions du monde présentent quant à elles, des villes aux réseaux routiers plus désordonnés. On peut expliquer ces différentes organisations à l’aide de différents facteurs : l’histoire, la topographie, la politique ou l’occupation du sol. Avec les méthodes présentées dans son article, Geoff Boeing donne aux personnes intéressées la possibilité de modéliser le réseau routier de leur propre ville et de le comparer à ceux des villes étudiées en utilisant la bibliothèque OSMnx.

Pour aller plus loin :

  • Geoff Boeing présente dans un récent article la possibilité d’utiliser la bibliothèque OSMnx dans un contexte de Big Data.
  • Dans un article du blog Maps Mania, Keir Clarke utilise le travail de Geoff Boeing pour montrer les orientations du réseau routier en fonction de l’appellation des routes (avenue, rue, boulevard, etc…).

Exemple des villes de Lyon et Saint-Etienne :

Pour extraire tout le réseau routier des villes de Lyon et Saint-Etienne, j’exécute le code suivant dans un environnement Python :

Figure 4 : Utilisation d’OSMnx pour extraire les réseaux routiers de Lyon et Saint-Etienne

La bibliothèque OSMnx extrait d’OpenStreetMap les réseaux routiers des deux villes. Il est également possible de n’extraire qu’un type de réseau (cyclable, piétonnier, …).

Figure 5 : Réseau routier de Lyon
Figure 5 : Réseau routier de Saint-Étienne

En modifiant un peu les exemples de code de Geoff Boeing disponibles sur GitHub, on obtient les histogrammes polaires suivants pour les deux villes accueillant le Master Géographies Numériques :

Figure 7 : Orientations des rues de Lyon et Saint-Etienne

On remarque que les deux villes présentent un réseau routier dont l’orientation s’organise selon deux axes principaux (Nord-Sud et Est-Ouest) mais ont également une distribution plus diffuse pour le reste, notamment Saint-Étienne qui possède des rues réparties quasiment uniformément dans toutes les directions. Dans les deux cas, on retrouve des réseaux routiers globalement désordonnés.

Sources :

https://geoffboeing.com/2019/09/urban-street-network-orientation/
https://appliednetsci.springeropen.com/articles/10.1007/s41109-019-0189-1
https://geoffboeing.com/2016/11/osmnx-python-street-networks/
https://github.com/gboeing/osmnx
https://twitter.com/gboeing/status/1171463946563252227

* Quelques articles sur l’entropie :

https://actu.epfl.ch/news/et-si-du-desordre-urbain-naissait-la-durabilite/
http://www.lecourrierdelarchitecte.com/ArticleEtudiant_1414
https://journals.openedition.org/ambiances/261#tocto2n3

Modérateurs : Victor Bonnin et Yan Kiu Mok

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Un Site WordPress.com.

Retour en haut ↑

%d blogueurs aiment cette page :